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À 108 ans, la pianiste Colette Maze défie le temps et sort un nouvel album

L'ancienne professeur de musique, élève d'Alfred Cortot et Nadia Boulanger, pratique encore quatre à cinq heures par jour dans son appartement parisien.

Un phénomène, auquel Envoyé spécial, jeudi soir, a consacré un portrait. Colette Maze, à 108 ans, joue toujours du piano quotidiennement et est suivie par des milliers de personnes sur les réseaux sociaux. Née un mois avant le début de Première Guerre mondiale, la pianiste française pratique encore quatre à cinq heures par jour. Elle s'apprête à sortir avant l'été son septième disque, 108 ans de piano, avec des morceaux de Gershwin, Piazzolla, Schumann et Debussy.

Dans son appartement situé au 14e étage d'un immeuble donnant sur la Seine, cette dame frêle aux bras graciles se déplace lentement entre les trois pianos qui trônent dans son salon : celui qui l'accompagne depuis ses 18 ans, un deuxième en sourdine pour les exercices et le Steinway qu'elle s'est payé pour le beau son. Sa longévité impressionne, son enthousiasme plus encore. «Moi, je suis jeune, s'exclame-t-elle. L'âge, ce sont des histoires qui n'existent pas. (...) Il y a des gens qui sont éternellement jeunes, émerveillés de tout, et puis des gens qui sont blasés de tout et qui n'ont jamais rien aimé, même pas leur mec, si ça se trouve!» A ses côtés, son fils, le journaliste Fabrice Maze, indique, non sans fierté, qu'elle «est probablement la dernière centenaire à continuer d'enregistrer des albums».

Depuis qu'elle a atteint les 100 ans, Colette Maze est devenue la coqueluche des réseaux sociaux, avec sa page Facebook dédiée. «Elle redonne le moral aux gens, d'où son succès fou, explique son fils. Elle n'a ni diabète, ni cholestérol, sa tension est normale. Elle boit du vin, mange du fromage, du chocolat... Et les gens qui ont 80, 90 ans se disent: Finalement, on n'est pas foutus”.»

Pourquoi continue-t-elle à jouer? «Parce que c'est ma vie... Le piano, c'est un ami. J'ai besoin de le sentir et de l'écouter.» STEPHANE DE SAKUTIN / AFP

La mémoire de la pianiste n'est naturellement plus ce qu'elle était mais elle garde un souvenir lointain à 4 ans des bombardements de la «Grosse Bertha», pièce d'artillerie utilisée par les Allemands lors de la Grande Guerre. La Libération, en revanche, s'est effacée de sa mémoire. Quand il s'agit de savoir qui est le président de la République, elle répond souvent Pompidou ou Chirac. «Elle est dans l'instant présent mais est complètement déconnectée de l'actualité», commente son fils.

Lors de la Seconde Guerre mondiale, «j'ai été infirmière à Auxerre (Yonne) et j'ai fait l'exode (de 1940) à bicyclette, de Paris à Clermont-Ferrand avec deux sacoches pleines de linge», se rappelle-t-elle. Les souvenirs intacts sont souvent liés au piano: «Quand j'étais petite, j'étais asthmatique; ma maman jouait du violon avec mon professeur de piano et ça me calmait». Pourquoi continue-t-elle à jouer? «Parce que c'est ma vie... Le piano, c'est un ami. J'ai besoin de le sentir et de l'écouter», dit-elle avant d'interpréter Les reflets dans l'eau de Debussy. «Schumann était à l'écoute de son cœur, Debussy, à l'écoute de la nature», estime-t-elle.

Née Saulnier au sein d'une famille bourgeoise à Paris, elle commence le piano à 5 ans mais ses parents s'opposent à ce qu'elle devienne pianiste professionnelle. Elle parvient toutefois à 15 ans à intégrer l'École normale de musique de Paris, où elle suit les cours d'Alfred Cortot et Nadia Boulanger. Elle enseigne à son tour pendant des décennies à l'École normale de musique et au conservatoire de Bagneux, dépositaire de la méthode Cortot, enseignée avant la guerre et fondée sur des exercices de décontraction et d'assouplissement de tous les muscles. «C'est la dernière au monde à pouvoir montrer cette méthode; beaucoup de pianistes du monde viennent la voir travailler», explique Fabrice Maze.

C'est ainsi que la centenaire, qui ne souffre quasiment pas d'arthrose, a gardé la souplesse des mains. Son secret de jouvence ? «J'ai fait beaucoup de danse. Je pense que j'ai besoin de sentir mes muscles, mes abdominaux, mes cuisses, mes bras. Tout ça, ça doit être vivant».


À 108 ans, la pianiste Colette Maze défie le temps et sort un nouvel album

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18 commentaires
  • Salluste10

    le

    Vous êtes la preuve idéale de la joie de mener une carrière qu' on aime sans s' occuper de la retraite!

  • Salluste10

    le

    Bravo ,madame !
    Je vous souhaite de vivre votre passion pendant encore de nombreuses années !
    Quand on a un but artistique ,comme le vôtre ,on ne vieillit pas !

  • @arpy_cod

    le

    Bravo madame et vous resumez tout l’intérêt de continuer a vivre

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